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Reconstruction après une relation d’emprise avec un Pervers Narcissique

écrit par Alexandra Lecart, Psychologue (2019)

La perversion narcissique, un sujet à la mode ? Ceux qui disent cela n’ont probablement jamais vécu une relation d’emprise. Si on en parle beaucoup, c’est bien. Il faut en parler. La perversion détruit, la perversion tue. C’est une réalité et non une mode ou une métaphore psychanalytique. Les victimes de personnalités perverses narcissiques sombrent dans la dépression, l’isolement, le doute de soi, la confusion, la honte, jusqu’à épuisement et envie, presque besoin, de passer à l’acte, pour sortir du cauchemar. Les dégâts psychologiques mais également somatiques (symptômes physiques, développement de maladies…) sont bien réels. C’est pour cela qu’il faut continuer de parler de la perversion, des conséquences, des victimes, et commencer à traiter les narcissiques pathologiques. C’est une urgence, un objectif en santé mentale d’utilité publique. En attendant l’augmentation des groupes de parole partout en France (et non uniquement dans quelques grandes villes), une meilleure identification des pervers narcissiques, la formation des professionnels de santé aux personnalité toxiques et perverses, le développement de protocoles thérapeutiques et de soins pour les victimes, la prise en charge des pervers narcissiques… voici quelques pistes destinées aux victimes de Pervers Narcissiques, afin qu’elles puissent aller vers une reconstruction d’elles-mêmes :

  • Couper la relation avec l’individu pervers dès que cela est possible. Le sevrage sera extrêmement difficile à tenir (la relation d’emprise est une relation addictive, la victime est « droguée » psychologiquement) mais il faut vraiment envisager cette rupture définitive si on veut survivre. La perversion est une pathologie psychiatrique. Elle tue progressivement. Rester, c’est mourir à petit feu dans une destruction invisible et inévitable.
  • Faire le deuil d’une communication normale et d’une relation normale. Le discours du pervers narcissique n’a jamais été sincère ni authentique, à aucun moment. Sincère pour avoir ce qu’il voulait, vous, mais sinon tout était faux, calculé, prévu, anticipé et surtout contrôlé (le maitre-mot des PN). Il faut commencer à faire pareil pour s’en sortir. Pas dans une visée destructrice, mais dans le cadre d’une stratégie de sortie. Sauver sa peau ne doit pas avoir de prix, et cela commence au préalable par le deuil que cette relation était normale et réciproque.
  • Ecouter la petite voix intérieure. Elle chuchote depuis le début « c’est bizarre », « il/elle est pas pour toi », « c’est trop beau pour être vrai », « j’ai l’impression qu’il/elle me ment », « j’ai l’impression qu’il/elle se contredit »… Elle ne parle pas fort car elle est étouffée par la « drogue », la pensée-poison de la relation d’emprise qui s’opère depuis la seconde où vous avez rencontré le PN. Plus le temps passe et moins cette petite voix parle, car la perversion opère son gas-lighting, une technique progressive, intrusive et hypnotique, qui met le doute dans chaque pensée, chaque geste et peu à peu dans toute la connaissance de soi de la victime.
  • Garder le contact avec ses amis et son entourage. Si le contact est rompu ou éloigné à cause du PN, le reprendre coûte que coûte. Si les narcissiques pervers isolent leurs victimes, c’est parce qu’ils savent d’instinct qu’une personne bien entourée est plus forte, qu’elle pourra appeler ou dormir chez quelqu’un si besoin, donc s’éloigner (c’est la perte de contrôle pour le PN). Les autres, l’entourage, c’est la vie, c’est également qui vous êtes. Nous sommes des animaux sociaux, les perdre c’est vous perdre. Ne perdez pas contact ou reprenez-le si c’est le cas, même si vous avez honte (probablement). Leur aide, leurs mots, leur soutien, leur réconfort, leur accueil, leur non-justement, leur amour, leur compréhension, sont des antidotes sacrés qui éloignent et diminuent l’emprise.
  • Prendre soin de soi et reconnecter avec son corps. Faire du sport, du yoga, de la sophrologie, manger des plats qui réveillent les sens, se faire masser, aller chez le coiffeur, danser et sentir son corps bouger, marcher pied nu sur l’herbe, fermer les yeux et observer le vent sur sa peau… et faire cela en pleine conscience, de son corps, de son âme, dans l’ici et le maintenant. Vous croyez être morts, ou être en train de mourir à petit feu, mais vous êtes encore vivants si vous lisez ces conseils. Vous cherchez des informations, des astuces, des témoignages, des explications, il vous reste donc encore de la pulsion de vie qui dit « je veux m’en sortir ».
  • Parlez à des gens qui vivent la même chose que vous. C’est dur de les trouver et pourtant vous êtes un nombre incommensurables de victimes à essayer de sortir de ce piège psychologique qu’est l’emprise toxique. Allez à des groupes de parole, parlez sur internet, lisez des livres et des témoignages. Vous n’êtes pas seuls, sachez-le. Un PN, c’est au total dans sa vie des dizaines de victimes collatérales (partenaires, enfants, mariages, re-mariages, amants, maitresses, amis, collègues, employés, amis…). Si c’est 3% de la population, les victimes de pervers narcissiques sont elles, démultipliées. La perversion est une pathologie grave et dangereuse. En attendent que l’Etat prenne au sérieux ce problème (ceci est un appel), regroupez-vous, soudez-vous, parlez, osez dire ce que vous vivez. La parole sera votre « arme » de survie (comme la parole/la rhtéorique est l’arme de destruction principale des PN). C’est pour cela qu’ils vous font taire et utilisent toutes les techniques pour cela (honte, culpabilisation, doute, menaces, peur…). La communication est la clé de sortie.
  • Croyez-vous. Quand le PN vous dit qu’il n’a pas dit… ce qu’il vient juste de dire, que « vous avez mal compris » ou que « vous êtes folle/fou » et que « vous fabulez », continuez au contraire à croire en chacun de vos gestes et en chacun de vos mots. La confiance en soi sera votre premier pas vers la reconstruction. Notez ce que vous dite ou faites si besoin, ainsi que ses actions et paroles à lui/elle aussi, cela vous rappellera que vous n’êtes pas fou/folle et le gas-lighting (semer le doute et la confusion chez la victime) ne pourra pas s’installer.
  • Faites-vous aider par un professionnel. La perversion narcissique est une pathologie, c’est une psychose blanche, c’est à dire une folie sans symptômes. Vous n’êtes pas fou/folle, mais lui/elle si. Un professionnel pourra vous aider et vous donner des conseils avisés dans une situation avec une personne présentant ce trouble grave. Il pourra également vous écouter, sans vous juger (ce qui n’a pas dû vous arriver depuis longtemps), vous mettre en contact avec des associations et vous proposer un cadre de confiance structurant où vous pourrez lâcher (enfin) vos défenses. Cette démarche thérapeutique vous rendra plus fort(e) et vous redonnera confiance en vous.
  • Utilisez la manipulation de survie. La relation n’a jamais été sincère, du début à la fin, tout était une stratégie pour avoir ce que le PN voulait, vous. Alors pour vous en sortir, il va falloir utiliser les mêmes cartes que la personne malade en face de vous, la manipulation. Pas la manipulation perverse et destructrice bien entendu, mais la petite manipulation de base qui vous permettra de sauver votre peau. Ne dites pas tout, mentez, flattez, omettez de tout dire, ne tenez pas vos promesses. De toutes façons, les PN clivent et vivent uniquement dans l’instant présent (c’est pour cela qu’ils ne se rappellent pas de ce qu’ils disent), ils ne vous en voudront donc pas. Sans parler du fait qu’ils font la même chose du matin au soir, ils ne verront donc pas le problème avec cette manière de faire, qui est « normale » pour eux. Cessez d’être sincères, vrais, authentiques et honnêtes avec eux, ou vous ne vous en sortirez pas. Laissez vos valeurs de côté avec les PN, ou vous ne sortirez pas de l’emprise.
  • Pardonnez-vous. Tout le monde peut se faire manipuler, c’est le principe même de la manipulation : donner l’apparence qu’on veut. Les victimes ne sont pas faibles ou fragiles. Au contraire, les PN ne vampiriseraient jamais une personne dont elles n’ont rien à tirer. Les PN choisissent des personnes lumineuses, hypersensibles, « pleines » (en contradiction avec le vide des PN) et remplies de vie (pulsion de vie/pulsion de mort). Vous en vouloir ou essayer de comprendre pourquoi c’est tombé sur vous ne vous fera que ruminer davantage dans un cercle vicieux dont vous ne sortirez jamais. C’est ce que veulent les PN. Ruminer et tourner en rond c’est continuer d’être dirigé comme une marionnette par la relation d’emprise. Stop ! N’est plus venu le temps des questions mais le temps de la reconstruction. De nombreuses questions resteront sans réponses et ce n’est pas grave. Vous ne pourrez jamais y répondre, pourquoi ? Il n’y a rien à comprendre, c’est une maladie.
  • Faire le deuil. Accepter d’avoir été une victime, d’être humain, d’avoir cru, d’avoir aimé, d’avoir attendu, d’avoir espéré. C’est ce qui fait de vous une belle personne. Partez sans vous retourner, sans tout comprendre, avec vos blessures qui deviendront des cicatrices. Tel l’art japonais du Kintsugi, elles vous rendront uniques et vous rappelleront que vous avez survécu, qu’on ne vous y prendra plus et peut-être même que vous aiderez plus tard d’autres personnes qui sont dans cette situation. Les « survivors » ou ceux qui sortent de l’enfer, se reconstruisent souvent en aidant les autres à leur tour, ainsi elles se guérissent, se réparent et se pardonnent dans une aide cathartique.
  • Quand vous aurez réussi à prendre vos distances avec le PN, gardez-les ! La relation d’emprise est un poison psychologique qui reste longtemps dans les « veines » (parfois plusieurs années). Il faut beaucoup de temps pour en sortir. En sortir veut dire ne plus être sensible au « poison », ne plus êtres addict à la drogue psychologique qu’il/elle vous donnait et vous enlevait quand il le souhaitait, vous infligeant un sevrage diabolique (technique du chaud/froid pour garder la victime « accroc »). Quand le/la PN reviendra longtemps après (car ils reviennent toujours, par plaisir pour jouer ou pour relancer l’emprise dans un moment de solitude), ne pensez pas que ça ira et que vous pouvez « juste prendre un café ». Laissez-lui vos affaires, votre argent (ils en prennent toujours à la victime), vos amis si besoin (c’est qu’ils n’en étaient pas vraiment) et sauvez votre peau. Ne regardez pas en arrière et tenez bons, résistez. La distance sera votre survie. Ne vous justifiez pas, ne répondez pas (oui c’est mal poli, mais tant pis). Comme les animaux « faites le/la mort(e) ». Aucune raison, explication ou culpabilisation de sa part ne doit vous faire craquer.

Ces conseils sont principalement ciblés pour les personnes victimes de relation d’emprise dans le cadre des relations affectives, professionnelles ou amicales. Ils sont différents (et plus complexes) pour les personnes qui vivent l’emprise dans le cadre familial. Les enfants de pervers narcissiques ou les partenaires/ex-partenaires qui ont des enfants en commun sont dans un lien encore plus complexe et pervers. Il y a néanmoins des choses à savoir ou à faire pour s’en sortir, tout en gardant le lien, malheureusement à vie. Il faut alors avoir conscience qu’on interagit avec une personne, malade, afin de pouvoir rester proche tout en gardant une distance psychologique. J’écrirai prochainement un article pour les victimes de perversion dans le cadre familial.

La reconstruction après une relation d’emprise avec un/une pervers narcissique prend du temps, les séquelles sont sérieuses et profondes, mais elle est possible, je l’ai vu tant de fois. La seule réponse à la pulsion de mort de la perversion… c’est la pulsion de vie.

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